Les contes de Noël
Le père Noël m'a dit
Valentine, allongée sur la moquette, écrit
dans son cahier. En tirant la langue, elle forme lentement ses lettres
sur la page blanche. « Cher Père Noël. J'espère
que tu vas bien... »
Mais Valentine n'a que six ans, et la suite est bien difficile à
rédiger. Elle arrache soudain la page du cahier et la froisse
rageusement.
- Je n'y arriverai jamais toute seule !
Et Valentine, bras croisés, se met à bouder.
C'est alors que son œil noir tombe sur le téléphone
mural de l'entrée.
- Si je ne peux pas lui écrire, eh bien, je vais lui téléphoner,
dit-elle.
Valentine grimpe sur une chaise, décroche le combiné
et pianote sur les touches
- D'abord le 0 - 1, pour avoir le ciel...
Valentine compose ensuite les lettres P/ E / R / E... N/ O/ E / L.
- Oui, j'écoute, dit une grosse voix à l'autre bout
du fil.
- Allô, Père Noël, crie joyeusement Valentine, c'est
moi !
Il y a un long silence, puis la voix demande :
- Qui est à l'appareil ?
- Ben, c'est Valentine ! C'est toi, Père Noël ?
- Qui demandez-vous ?
« Mais ce n'est pas possible, se dit Valentine, ce vieux est
complètement sourd ! »
Aussi hurle-t-elle à nouveau dans l'appareil :
- Allô ! Allô ! Je suis bien chez le Père Noël
?
L'homme semble enfin comprendre.
- Ah oui, bien sûr, bien sûr ! Ici le Père Noël
! Mais dis-moi, petite, comment as-tu trouvé mon numéro
?
- C'te blague, répond Valentine, j'ai composé ton nom
sur le cadran du téléphone !
L'homme, à l'autre bout du fil, rit de bon cœur.
- Père Noël, j'aimerais une grosse peluche que je pourrais
serrer contre moi, la nuit, quand j'ai peur, seule dans mon lit...
- Une peluche? Bien, bien, répond l'homme, amusé. Mais
... tes parents... ?
- J'ai pas de parents, répond Valentine. Ici, c'est un foyer,
Les Primevères, tu connais ? J'habite avec plein d'autres enfants,
et mon éducatrice s'appelle Barbara.
À l'autre bout du fil, le " Père Noël "
reste un moment silencieux.
- T'es toujours là ? demande Valentine, inquiète.
- Oui, oui, mon petit... Je... je note dans mon grand livre ; «
Ne pas oublier, au foyer Les Primevères, une grosse peluche
pour Valentine.
- Et pour mes copines aussi ! l'interrompt Valentine.
- Pour Valentine... et ses copines, bien sûr ! Au revoir, mon
petit.
Valentine repose lentement le combiné. Elle a le cœur
qui bat très fort.
- J'ai parlé au Père Noël. Et... le Père
Noël m'a parlé... Et il m'a dit...
Machinalement, elle passe plusieurs fois sa langue sur ses lèvres,
comme un chaton qui se pourlèche tes babines.
- Ce sera mon secret, murmure Valentine. Je n'en parlerai à
personne, pas même à Aurélie, qui est pourtant
ma meilleure copine.
Elle compte lentement le nombre de jours qui restent avant Noël
:
- Trois, quatre, cinq... Cinq ? Chouette ! Plus qu'une main à
attendre, s'écrie-t-elle, ravie.
Au matin du 25 décembre, dans le dortoir des Marmottes, Valentine
est la première à ouvrir les yeux.
- Ma peluche ! s'écrie-t-elle, jaillissant comme un diable
de sous les couvertures.
Elle court de lit en lit réveiller ses copines.
- Aurélie ! Laïla ! Fatoumata ! Levez-vous ! Le Père
Noël est passé !
- Ça va pas la tête ! Il fait encore nuit ! gémit'
Aurélie.
- Laisse-nous dormir ! proteste Fatoumata.
- Pour ce qu'ils sont beaux, les cadeaux du foyer, grogne Laïla
en replongeant sous les couvertures. Valentine les secoue comme des
pruniers :
- Debout ! Debout ! Debout ! J'ai parlé personnellement au
Père Noël,
leur apprend Valentine.
- Je ne te croîs pas ! dit Aurélie en sautant de son
lit.
- Si, si ! Il a promis une peluche pour nous toutes.
Les petits pieds nus descendent l'escalier quatre à quatre.
En pénétrant dans le grand réfectoire, les fillettes
restent figées d'émerveillement.Au pied du sapin illuminé,
un gros chien blanc, ta langue pendante, attend, sagement assis sur
son derrière. Accroché à son collier, il a une
pancarte sur laquelle est écrit :
« Je m'appelle Pattemouille... Joyeux Noël, les filles
! »
- Whouaf, whouaf, whouaf ! aboie joyeusement l'énorme boute
de poils blancs en levant une patte pour les saluer.
- Une peluche pour de vrai !
Valentine et ses copines se précipitent sur le magnifique
chien de berger à poils longs, l'embrassent, l'étouffent
de caresses.
- Joyeux Noël, Pattemouille !
Depuis, au foyer Les Primevères, quand un nouveau, pour faire
le malin, déclare avec assurance :
« Eh, vous savez quoi ? Eh ben, le Père Noël, ça
n'existe pas ! »
Tous les gosses du foyer éclatent de rire :
- Oh lui, hé ! Sûr qu'il existe ! Même que Valentine,
eh ben, elle a son numéro !
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